Le canal d’Hagneck est le cœur de la correction des eaux du Jura, par laquelle le Seeland bernois a pu être rendu cultivable. L’Aar a été dirigée dans le lac de Bienne à partir de 1878, grâce à une entaille sur la rive de celui-ci. Cependant, l’eau s’est rapidement infiltrée dans le sol, au point qu’une digue dut être construite à l’embouchure. C’est à cet endroit qu’en 1900, la première centrale du canton de Berne fut mise en service. Aujourd’hui, l’implantation et son sol alluvial jeune, avec leur faune et leur flore très riches, sont considérés comme un paysage culturel extrêmement précieux. Comme une rénovation décente de la centrale devait être effectuée et que le barrage devait être remplacé afin d’assurer une protection contre les crues, un concours d’architecture fut lancé. L’intégrité organique des nouvelles installations reflète le partenariat étroit entre l’ingénieur Martin Valier et l’architecte Christian Penzel qui s’est noué dans leurs bureaux communs. Elle s’inscrit avec harmonie dans le paysage et met en scène son vécu tout au long d’un chemin qui, dans une dramaturgie presque cinématographique, ouvre des perspectives toujours nouvelles. Celui-ci part du haut de la crête de l’entaille pratiquée dans la colline, décrit une grande boucle qui contourne la villa historique en longeant le bord de l’eau, passe sur un élégant pont vers la nouvelle salle des turbines et, en en faisant le tour, se termine en enjambant le canal. Ici, le pont ne passe pas sur la digue elle-même, mais plutôt sur son flanc, intensifiant l’expérience du barrage. D’un côté, le regard surplombe le lac et embrasse les versants du Chasseral. De l’autre, on aperçoit tout d’abord la salle des machines, puis le regard se confronte aux puissantes portes d’acier du barrage, par-dessus lesquelles il saute pour finalement voir le canal. Ainsi, le point de vue se trouve à peine au-dessus du niveau de l’eau, et l’échancrure présentée par la colline encadre le regard qui se porte sur les sommets éloignés de l’Eiger, du Mönch et de la Jungfrau. Les courbes du chemin contournent l’efficacité rectiligne du canal et du barrage. Sur celui-ci, le pont déploie une aile en saillie, subtile et impressionnante horizontale, produisant un fort contraste avec la verticalité bien ancrée des pylônes. Comme élément engagé dans l’entièreté du mouvement, elle souligne l’impression de résistance massive et immuable des piliers et de la salle des machines.